Christian Bobin, le dernier murmure d’un poète habité

by Mehdi Kenly
0 comments 2 minutes read

Ultime ouvrage d’un ultime poète. Des bribes de pensées, précieusement collectées par sa dernière épouse, la poète Lydie Dattas, constituent le dernier témoignage du poète immobile le plus adepte des voyages intérieurs : Christian Bobin. Titre divinement choisi puisque cette parole suprême se fait dans le fond d’une chambre d’hôpital, où se sentant tressaillir, il anticipa cette œuvre posthume. Des flashs-back de sa petite enfance, du grand commencement, jusqu’à ses succès littéraires inattendus, en passant par son amour inconditionnel de la musique, et d’un pianiste en particulier : Grigory Sokolov ; qui a accompagné sa création durant des décennies et qui, comme lui, est cet homme-unique qui sait saisir l’invisible. Il y a donc énormément de musicalité dans cette ode à l’amour : amour des petits gestes du quotidien, amour de l’autre (du médecin à l’ambulancière), amour des situations et des gens qu’il a rencontrés jadis. Pour Christian Bobin, chaque tête-à-tête avec la nature ou un être humain est un bouleversement, une leçon. Il ne nous propose pas une poésie mièvre et idéalisée pour autant, mais une prose fragmentaire atypique qui tente d’aller au fond des choses, de déceler le beau face auquel notre modernité passe trop souvent sans plus le voir, l’apprécier ne serait-ce qu’un instant. C’est cette « bataille qu’il a livrée toute sa vie, même jusqu’au fond de son lit de mort », celle du beau. Puis, dans un élan aussi christique que shakespearien, il enjoint son actuelle compagne – sa deuxième « plus que vive » – à le retrouver par-delà la mort, quand la sienne sonnera, afin d’être « deux enfants réenchantés ».

Un livre d’une intense émotion, qui pousse le lecteur à découvrir son œuvre dans le sens inverse, sans doute la meilleure des sorties.

Mehdi Kenly

Auteur/autrice

You may also like

Leave a Comment